
Mémorial en l’honneur des combattants des Commandos de France tombés au Haut-du-Tôt, http://girmont18.blogspot.com/2007/11/le-haut-du-tt-5.html
Voici un article qui me tient à cœur, à vrai dire, c’est la perspective de l’écrire qui m’a initialement motivé à recommencer à tenir ce blog au début de l’année (2011). C’est moins la critique d’un livre qu’une page de mon histoire familiale et c’est d’ailleurs par ça que je vais commencer.

François Guiraud (1922-2007), réfractaire du STO, évadé de France par l’Espagne, interné à Miranda, 1er Commando de France.
Mon grand-père paternel, François Guiraud, est décédé en 2007 et lors de son enterrement, de son oraison funèbre dans l’église, un vieil ami à lui est venu raconter à tous ceux présents qu’ils enterraient ce jour-là le seul résistant, le seul qui avait refusé le Service de Travail Obligatoire (STO) et engagé volontaire du village, Villemoustaussou. Tout le monde semblait interloqué même si, dans la famille, nous étions à peu près au courant de ses faits et gestes. En fait, ce qui a été révélateur pour moi, ce n’est pas tant que mon grand-père avait été militaire pendant la seconde guerre mondiale mais que tous les grands-pères n’avaient pas forcément été résistants ou militaires.
Bien entendu, c’est souvent une fois que certaines personnes décèdent qu’on se pose des questions sur elles, les questions auxquelles seules ces personnes auraient eu une réponse… Ça a été mon cas, et quelques années après son décès, je me suis mis dans l’idée de récupérer des informations sur ce qu’avait fait mon grand-père pendant la seconde guerre mondiale en commençant par fouiller dans mes souvenirs. Un vieux poster par ici, un bibelot par là, des photos, des bribes de discussions, etc. Finalement, j’ai pu facilement me rappeler qu’il fut un évadé de France, un de ceux qui avaient refusé le STO et s’étaient enfuit de leur ville/village pour rejoindre l’Afrique du Nord (et les forces françaises libres qui s’y situaient) en passant par l’Espagne (par le col de la Nuria il me semble), qu’il s’était fait capturer par les franquistes et interné dans un camp de prisonniers (à Miranda ?). Une fois libéré, il a rejoint l’Afrique du nord où après quelques errances, il a pu faire partie des Commandos de France. A partir de là, j’ai eu dans l’idée de recueillir certaines informations militaires normalement accessibles par la famille (histoire d’avoir une idée des épreuves qu’il aurait pu traverser) et mis en conséquence dans mon carnet d’adresses celles qui pouvaient m’être utiles. Ceci dit, après avoir discuté de mon projet dans la famille, on m’a rapporté que mon grand-père avait conseillé à ceux qui se seraient intéressés à son passé de lire « Les commandos de France – Volontaires au béret bleu 1944-1945 » de Maja Destrem. « Que tout était là dedans ».
Effectivement, en lisant la préface, les annexes, j’ai pu voir que ce livre était l’aboutissement d’un gros travail de recherche. A base de plus de témoignages et de documents officiels que je n’aurais espéré recueillir. La seule chose qui me manquait par rapport à cet ouvrage est tout simplement le feedback de mon grand-père.
Ainsi donc, si vous êtes de ma famille et/ou que vous vous interrogez à propos de cette période de l’histoire militaire de la France, de ce détachement militaire, les Commandos de France, dont on ne parle que très rarement hors des sites d’associations bien spécifiques d’anciens combattants. Alors, ce livre est pour vous.
Il relate la mise en place précoce du commando : de l’activité de lobbyisme de D’Astier de la Vigerie qui en sera le commandant, du recrutement, de l’entrainement, de leurs péripéties qui précèdent le débarquement de ces troupes à Saint-Tropez. Il s’attache ensuite aux faits militaires dans un style parfois aride, parfois maladroit, hésitant entre le roman et l’étalage des faits proprement dits. Je ne peux pas en tenir rigueur dans la mesure où il a fallut que Maja Destrem « syncrétise » tous les témoignages, les anecdotes, les informations documentaires, en un récit à la fois objectif et riche de détails. La narration se veut neutre mais on sent sans hésiter que le point de vue change de « scène » en « scène » selon l’origine du témoignage. Le sentiment final de ma lecture est une grande reconnaissance du travail accompli, inestimable, modéré par un certain amusement que je trouve inapproprié (de ma part).
Je m’explique. L’essentiel des gens recrutés dans les commandos de France semblaient être de jeunes rebelles patriotes évadés de France puis d’Espagne, laissés pour compte des mois durant dans les rues d’Alger (puis entrainés dans une situation précaire puis laissés de nouveau pour compte en attendant de les envoyer au front) => très loin de la discipline de fer à laquelle pense le français moyen que je suis en pensant à une troupe de commandos. Et effectivement, au fil des évènements relatés dans le livre, on a parfois le sentiment de vivre une scène des 12 salopards ou de la 7ème compagnie. Je tiens à m’excuser pour ces propos mais j’ai été nourri de « jour le plus long », de « full metal jacket », de « grande vadrouille », d' »inglourious basterds », de « band of brothers » (rappelez vous l’épisode en hiver dans les Vosges, c’était apparemment aussi le « morceau » des commandos) et autres films réalisés par des gens qui n’ont surement vu la guerre que dans les journaux. Je ne sais pas si les situations parfois cocasses (vols) parfois atrocement malchanceuses (au Haut du Tôt où la levée soudaine d’un épais brouillard révèle les commandos à une batterie de mitrailleuses allemandes qui les fauchent) qui sont relatées dans ce livre furent courantes à cette époque où nécessité faisait loi ou le sont encore en Irak ou en Afghanistan.
En tout cas, je trouve l’histoire des commandos de France très cinématographique, très charismatique. A la lecture, ils me semblent plus vrais que nature, parfois chiens fous et filous, souvent acharnés, démunis devant l’adversité mais ne lâchant rien. Y en a qui ont payé des scénaristes pour raconter des histoires moins palpitantes que la leur et avec des personnages ternes à souhait. Indépendamment du fait que cette partie fait partie de mon histoire familiale (ou du moins de l’histoire d’un membre de ma famille), je trouve injuste de voir tout ça sombrer dans l’oubli (anecdote : le square des Commandos de France à Bordeaux est en travaux et nul ne sait ce qu’il adviendra d’elle).
Si cette période du passé vous intéresse, que vous êtes à la recherche de témoignages et de souvenirs des Bataillons de Choc (les Commandos de France seront plus tard renommés en tant que 3ème Bataillon de Choc), je vous invite à rejoindre le forum de discussion suivant : Forum sur la reconstitution et l’histoire des Bataillons de Choc
Ajout du 26 mai 2012 : En ce mois de mai, Jean-Mathieu Boris publie un livre sur son parcours durant la seconde guerre mondiale. Tout l’intérêt pour moi est que mon grand-père François Guiraud était dans la 1ère compagnie des Commandos de France, dans le 4ème peloton si j’en crois les documents, alors que Jean-Mathieu Boris était dans la même compagnie mais dans le 3ème peloton.